Le remplacement de la GnRH sauve la cognition dans la trisomie 21

Intervention pour le syndrome de Down

LA SCIENCE

2 sept. 2022

Volume 377 , Numéro 6610

DOI : 10.1126/science.abq4515

POINT DE VUE CONNEXE

Stimuler la cognition avec une hormone

Le syndrome de Down (DS), résultat de la trisomie du chromosome 21, s’accompagne d’une suite de symptômes comprenant une déficience intellectuelle et une perte d’olfaction. Manfredi-Lozano 

et al . ont reconnu une similitude entre certains des symptômes du DS et ceux observés chez les patients présentant un déficit en hormone de libération des gonadotrophines (GnRH) (voir la perspective de Hoffmann). En effet, l’analyse d’un modèle murin de DS a montré des déficits d’expression de la GnRH. Les interventions qui ont restauré les niveaux physiologiques de GnRH dans le modèle DS de souris ont également amélioré les déficits cognitifs. Dans un essai clinique préliminaire chez des patients atteints de SD, la thérapie pulsatile à la GnRH a amélioré la cognition. —PJH

Résumé structuré

INTRODUCTION

Les patients atteints du syndrome de Down (DS), une affection fréquente (1 pour 800 naissances vivantes) causée par la trisomie du chromosome 21, présentent diverses caractéristiques, notamment un déclin cognitif dû à une maladie de type Alzheimer d’apparition précoce ainsi que des anomalies de la myélinisation à l’âge adulte , troubles de l’olfaction débutant avant la puberté et hypofertilité. Aucun traitement viable n’existe pour les déficits cognitifs et olfactifs observés chez les patients DS.

RAISONNEMENT

L’hormone de libération des gonadotrophines (GnRH), qui est sécrétée de façon pulsatile par des neurones hypothalamiques spécialisés, est la molécule maîtresse qui contrôle la reproduction chez tous les mammifères. Chez l’homme, la sécrétion altérée de GnRH conduit au syndrome de Kallmann, qui se manifeste par des défauts olfactifs, une immaturité gonadique et une infertilité. Les neurones hypothalamiques exprimant la GnRH se projettent également vers des zones extrahypothalamiques, y compris celles impliquées dans les fonctions intellectuelles. Nous nous sommes donc demandé si les déficits progressifs observés dans le DS avaient une corrélation temporelle avec la maturation du système GnRH ; quelles altérations de ce processus, le cas échéant, pourraient être observées dans le cerveau des modèles animaux de SD ; et si ces altérations pouvaient être inversées thérapeutiquement à l’âge adulte.

RÉSULTATS

Nous avons d’abord caractérisé un modèle de souris trisomique de DS qui triple des régions analogues au chromosome humain 21 (souris Ts65Dn) et affiche une sous-fertilité et des troubles cognitifs et olfactifs progressifs similaires à ceux des patients atteints de DS. Ces symptômes neurologiques non reproducteurs étaient étroitement liés à une perte postpubertaire de neurones et de fibres à GnRH dans l’hypothalamus ainsi que dans les régions extrahypothalamiques, ce qui se traduit par des changements dans les niveaux et le schéma de libération de l’hormone lutéinisante gonadotrophine (LH) dans le sang. La diminution de l’expression de la GnRH chez les souris adultes s’est accompagnée d’un déséquilibre dans un réseau complexe de microARN (dont plusieurs se produisent sur la région trisomique) et de facteurs de régulation qui constituent un « interrupteur » qui contrôle l’expression de la GnRH et la maturation des neurones à GnRH dans l’hypothalamus, commençant pendant la période infantile ou « minipuberté ». En effet, nous avons observé que des éléments de ce switch étaient dérégulés dès la période minipubertaire, bien avant l’apparition des déficits cognitifs ou olfactifs. De plus, cette expression altérée des microARN et des facteurs de transcription dans l’hypothalamus semble entraîner l’expression altérée de plusieurs gènes cibles, dont plusieurs impliqués dans la myélinisation et la transmission synaptique, à la fois dans l’hypothalamus lui-même et, dans une bien plus grande mesure, dans l’hippocampe, ainsi que dans l’activité altérée des neurones hippocampiques. La surexpression d’un microARN clé impliqué dans le commutateur développemental de la GnRH, miR-200b, dans l’hypothalamus a aboli à la fois les modifications de l’expression génique et les déficits de l’activité neuronale, de l’olfaction et de la cognition chez les souris DS. La réinduction de miR-200b à l’âge adulte, longtemps après le changement de GnRH, a augmenté à la fois le nombre de neurones exprimant la GnRH dans l’hypothalamus et la proportion de neurones exprimant l’un de ses activateurs transcriptionnels, Otx2, qui est connu pour contrôler l’ouverture et la fermeture de autres périodes critiques de la maturation cérébrale. Pour vérifier que ces améliorations étaient bien dues à la restauration de la GnRH, nous avons utilisé la thérapie cellulaire avec des neurones hypothalamiques normaux ainsi que des interventions chimiogénétiques et pharmacologiques pour produire de la GnRH à des niveaux et des schémas physiologiques (c. ces traitements ont tous aboli les défauts olfactifs et cognitifs chez les souris. Enfin, sur la base de ces résultats, nous avons réalisé une étude pilote chez des patients DS pour évaluer les effets de la thérapie pulsatile à la GnRH sur l’olfaction, la cognition, et la structure et la fonction du cerveau. Ce traitement est sûr et est actuellement utilisé pour traiter les affections déficientes en GnRH comme le syndrome de Kallmann. Nous avons constaté qu’un traitement à la GnRH pulsatile de 6 mois améliorait à la fois les performances cognitives et la connectivité fonctionnelle du cerveau chez ces patients.

CONCLUSION

Le maintien du système GnRH semble jouer un rôle développemental dans la maturation cérébrale et les fonctions supérieures. La thérapie pulsatile à la GnRH est prometteuse pour améliorer les déficits cognitifs dans le SD, ouvrant la voie à de futurs essais cliniques.

La thérapie pulsatile à la GnRH améliore la cognition dans le SD.Les patients DS présentent des troubles olfactifs et cognitifs en plus d’une déficience intellectuelle et de déficits de maturation reproductive. Les neurones à GnRH, qui contrôlent la reproduction, projettent également vers les zones cérébrales impliquées dans la cognition telles que l’hippocampe. Chez les souris trisomiques Ts65Dn, qui imitent les caractéristiques des patients DS, l’expression de la GnRH disparaît progressivement. La thérapie pulsatile à la GnRH chez les patients DS améliore la connectivité et la fonction cérébrales. UI/litre, unités internationales par litre.

Résumé

À l’heure actuelle, aucun traitement viable n’existe pour les déficits cognitifs et olfactifs du syndrome de Down (DS). Nous montrons dans un modèle DS (souris Ts65Dn) que ces symptômes neurologiques non reproducteurs progressifs sont étroitement parallèles à une diminution postpubertaire de l’expression hypothalamique et extrahypothalamique d’une molécule maîtresse qui contrôle la reproduction – l’hormone de libération des gonadotrophines (GnRH) – et semblent liés à un déséquilibre dans un réseau de gènes microARN connu pour réguler la maturation des neurones à GnRH ainsi que la transmission synaptique hippocampique altérée. Les interventions épigénétiques, cellulaires, chimiogénétiques et pharmacologiques qui rétablissent les niveaux physiologiques de GnRH abolissent les défauts olfactifs et cognitifs chez les souris Ts65Dn, tandis que la thérapie pulsatile à la GnRH améliore la cognition et la connectivité cérébrale chez les patients adultes DS.

Post Covid chez l’enfant

Symptômes post-Covid chez l’enfant, parfois prolongés mais jamais bien graves
Des symptômes persistants significatifs d’un « Covid long » ont été décrits chez les patients adultes atteints d’une forme sévère de la maladie, mais aussi, bien que moins bien caractérisés, après des formes modérées. Pour les enfants, on en sait moins sur les séquelles possibles de l’infection à long terme. En dehors du rare syndrome inflammatoire multi-systémique (MIS-C ou PIMS) et du fait du bon pronostic de l’infection, l’impact à moyen et long terme de la Covid-19 sur la santé de l’enfant est mal connu.

Pour l’évaluer, une équipe norvégienne a exploité les données concernant plus de 700 000 enfants âgés de 1 à 9 ans, dans la période entre le 1er août 2020 et le 1er février 2021 : plus de 10 000 d’entre eux ont été testés positifs au SARS-CoV-2, et 276 000 testés négatifs. Aucun n’a été hospitalisé. L’objectif de l’étude était d’évaluer l’utilisation des services de santé (médecins généralistes, urgences, spécialistes) dans les 6 mois suivant un test. Les enfants ont été divisés en plusieurs groupes d’âge : les 1-5 ans, 6-15 ans et 16-19 ans. Les auteurs partent de l’hypothèse que, l’infection étant moins sévère chez l’enfant, l’augmentation de l’utilisation des services de santé devrait être moins marquée et moins prolongée que pour les adultes.
Davantage de consultations chez le médecin généraliste dans les mois suivants
Les données montrent un accroissement substantiel, de 300 % à 400 %, des consultations chez les médecins généralistes dans le mois suivant pour les enfants avec un test positif à la Covid-19, en comparaison de ceux avec un test négatif, dans tous les groupes d’âge. Trois mois plus tard, les consultations restent plus fréquentes pour les plus jeunes, mais pas pour les 16-19 ans. Les 1-5 ans consultent encore 9 à 12 semaines après un test positif.

Cette augmentation du nombre des consultations après une Covid-19 ne concerne que les médecins généralistes, mais non pas les spécialistes.

Le motif principal de consultation est la présence de symptômes respiratoires, ce qui contraste avec le vaste éventail de manifestations rencontrées au cours des covid longs chez l’adulte (digestives, cardiovasculaires, musculo-squelettiques, etc.).

Ceci suggère que chez l’enfant, l’infection n’est pas à l’origine de problèmes de santé durables nécessitant le recours aux spécialistes. Pour les auteurs, cela doit être pris en considération dans la décision de vaccination des enfants et dans le maintien des mesures de contrôle du virus une fois que tous les adultes sont vaccinés.

Dr Roseline Péluchon

RÉFÉRENCES
Magnusson K et coll.: Healthcare use in 700000 children and adolescents for six months after covid-19: before and after register based cohort study. BMJ2022;376:e066809. doi.org/10.1136/BMJ-2021-066809