La Covid-19, tirée par les cheveux

Les symptômes habituels de la Covid 19 sont la fièvre, la fatigue, les myalgies et arthralgies, des céphalées, une dyspnée, une toux sèche, l’agueusie, l’anosmie, une pneumonie. Un très grand nombre de manifestations cutanées ont également été rapportées au premier rang desquelles les pseudo-engelures chez les adultes jeunes et des rashes maculo-papuleux-vésiculeux. La pathophysiologie de celles-ci a été débattue : sont-elles la conséquence directe de l’infection virale ou la traduction d’un dérèglement de la réponse immune au SARS-CoV-2 ? En l’absence de réponse claire, la liste des possibles effets dermatologiques de la Covid-19 s’allonge, englobant même pelade et alopécie androgénique. Cependant, au chapitre capillaire c’est l’effluvium télogène accompagné ou non de trichodynie qui risque, comme dans d’autres infections, d’être le plus fréquent.

Pour le vérifier un appel international a été lancé en avril 2020, par les auteurs de cet article, à des experts en pathologie du cheveu dans le but de réunir des données démographiques et cliniques sur leur patients venus les consulter pour des affections cutanées et du cuir chevelu et ayant signalé avoir eu la Covid 19.
Effluvium télogène et trichodynie
Au total les données de 128 patients adultes, 24 hommes et 104 femmes ont été collectées. En ordre de fréquence décroissante ont été observées des éruptions morbilliformes (33 %), urticariennes (21 %), à type d’érythème polymorphe (20 %), pseudo varicelleuses (20 %) et purpuriques (16,7 %). Des cas de zona (13 %) et poussées de dermatite atopique (6 %) ont été également constatés. Cependant un effluvium télogène était rapporté par plus de deux tiers des patients (66,3 %), avec dans la majorité des cas un début précoce (1 mois) après l’infection et pour 47,8 % des patients, un début après 12 semaines ou plus. Plus de 58 % des patients souffraient aussi d’une trichodynie qui pouvait se traduire par : des démangeaisons, sensations de brûlure, douleur ou paresthésie au niveau du cuir chevelu. Elle était cotée comme sévère dans 32 % des cas. Au total 44 % des patients souffraient à la fois d’effluvium télogène et de trichodynie.

Le tableau clinique de la Covid était de gravité modérée. L’anosmie et les céphalées ont toutefois été associées positivement avec la trichodynie (odds ratio 6,68 et 6,31 respectivement). Des traitements ont été prescrits dans moins de deux tiers des cas : corticoïdes topiques (en cas de trichodynie), minoxidil topique, supplément en vitamines du groupe B, lotions antidouleurs, antichute…Une résolution complète de l’effluvium télogène et/ou de la trichodynie a été obtenue dans 90 % des cas. Mais ces manifestations persistaient pour les autres patients à la fin de l’étude.
Parfois un début précoce
Cette analyse montre que des patients avec un antécédent récent de Covid-19 sont susceptibles de consulter un spécialiste du cuir chevelu pour un effluvium télogène accompagné ou non d’une trichodynie. Outre l’effluvium télogène, survenant typiquement trois à 4 mois après une infection, peut être observé un effluvium précoce se produisant dans un délai de moins de deux mois.

Agueusie, anosmie et céphalées étaient plus souvent présentes en cas de trichodynie associées. Les auteurs émettent l’hypothèse que les effluvium précoces sont liés à un effet délétère direct du virus par le biais de phénomènes immunitaires et de microthromboses au niveau de la vascularisation folliculaire.

Les limites de cette étude sont bien sûr le recrutement dans des consultations spécialement dédiées aux problèmes capillaires et le faible nombre de patients. Elle attire néanmoins l’attention sur un autre effet de la Covid 19 qui est sans doute quelque peu passé inaperçu…

Dr Marie-Line Barbet

RÉFÉRENCE
Starace M et coll. : Trichodynia and telogen effluvium in COVID-19 patients: Results of an international expert opinion survey on diagnosis and management. JAAD Int.,2021:11-18. doi: 10.1016/j.jdin.2021.07.006.

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